Bienvenue sur votre nouveau/dernier salon où on cause techno et parfois littérature !

Défricher sur le net quelques infos/actus relatives à l'édition numérique, aux livrels (le livre crypté en octets, façon 3e millénaire), aux liseuses (le matériau up-to-date destiné à épargner quelques arbustes en Amazonie)... mais aussi partager avec quelques happy-few les perles, tendances, cris de joie et de douleurs... bref, modestement être dans le stream des flux : c'est une ambition sommes toutes louable ? xxxxxxxxxjeanlou bourgeon

jeudi 11 mars 2010

Edition numérique : "nous autres, webeux" by François Bon

Reprise de l'illustration du post de François : "Que vous rapporte ce site"

Dernier post en date sur le site de publie.net. 
Quelques coups de hache dans le texte (sorry, François...),  l'enrichissement en rouge est de moi -
La totale à découvrir ici, chez François Bon...

... Réponse à une enquête
 Quand vous avez créé votre site Le Tiers Livre, quelle était votre intention ? Combien de temps y consacrez-vous par jour ?
Mon premier site perso est devenu progressivement un site collectif (qui existe toujours, remue.net), mon intention en créant TL c’était de revenir à un espace mieux circonscrit à expérimentation personnelle.
Je n’y consacre aucun temps spécifique : je fais mon travail d’auteur, lire, écrire, me balader, réfléchir, échanger, ...
....j’aime bien explorer ces nouveaux espaces de langage qui émergent : Flaubert comme les autres gambergeait, grognait, aimait les odeurs de sa cuisine, avec un outil comme twitter ce n’est pas écrire ou parler en plus, juste que cet espace précis devient partageable – pourquoi s’en priver ?
...il y a peu encore, restaient compartimentés hors de l’activité réseau, deviennent perméables : il y a quelques mois, entrer dans 3 heures de cours ou atelier d’écriture, on coupait la relation réseau. Cette année, suis très curieux d’exploiter la connexion en direct, les étudiants présents dans la salle entre eux et moi avec eux : travailler avec la présence réseau comme on travaille avec la présence corps.
Que vous apporte ce site ? Un lien plus direct au lecteur ? Une façon différente d’écrire ?
Mon site ne m’apporte rien. Strictement rien, pas d’argent en tout cas. On n’écrit pas pour un lecteur, on travaille pour soi – sinon ce n’est vraiment pas la peine, mieux vaut aller faire un métier qui permet de manger.
... Un Gracq n’a publié que 2/10 de ce qu’il écrivait au jour le jour, incluant éphémérides (voir chapitre de ce nom dans Lettrines), notes de lecture, notes d’observation, et combien sommes nous de dizaines à avoir reçu de ses mini cartes de visite avec messages souvent pas plus longs que 140 caractères ? 

Gracq twittait avec amour, et tous les jours.

... Je me sens bien empêché lorsque je dois revenir à l’écriture manuscrite, qui de toute façon n’a jamais été une instance déterminante dans notre histoire littéraire, par rapport à la composition mentale, à l’écrit dicté, à la correction sur placard d’imprimerie etc. – ô la colère de Flaubert contre ceux qui utilisaient la plume d’acier au lieu de la plume d’oie, la littérature allait s’y noyer !
...cette radicalité est de toute façon indifférente de ses supports, voyez Artaud, voyez Char, voyez Harms...

Vous possédez, je crois, un Sony reader. Cela a-t-il changé votre façon d’envisager la lecture ?
...Mais non, on s’en sert strictement comme un livre papier, juste un peu plus pratique parce que plus léger, contenant une partie de la bibliothèque et permettant la prise de notes et la recherche plein texte. J’y ai surtout mes lectures de base, Saint-Simon, ou Proust ou Balzac, ou la lecture loisir, relire un Jules Verne ou un Arsène Lupin.
Je crois que la vraie révolution de la lecture, c’est le déplacement qui s’amorce (même si c’est dans une continuité, qu’on a toujours recopié etc) du lire au lire-écrire (il y a de très belles notes de Duras ou d’Aragon sur cette expression). 
... Globalement, dans une journée, le temps passé à lire n’a pas changé pour moi, de ce que c’était il y a 10 ans ou maintenant – juste que dans la répartition de ce temps, l’ordinateur prend une place de plus en plus essentielle, depuis le journal du soir jusqu’à la correspondance privée ou l’émission de radio, et bien sûr la lecture dense.

L’émergence des "liseuses", est-ce la mort du livre papier ?
Bien sûr. 

De même ...depuis la guitare électrique personne n’a jamais plus joué de violon !
...l’industrie du livre va sans doute évidemment beaucoup se transformer, mais ça concerne peu la création littéraire elle-même, qui n’en est qu’un tout petit gravier.
Par contre, les librairies de ville, en tant que lieu matériel d’une communauté autour des expériences de langue, peuvent garder un vrai rôle.

 Comprenez-vous les résistances de certains face au livre numérique ?
Il faut le leur demander. Contrairement aux sciences, ou bien aux musiciens, la corporation des écrivains semble la plus imputrescible pour ce qui est d’accepter les usages numériques, alors que paradoxalement toute l’industrie du livre, depuis longtemps, est numérique. Reste à savoir si les cétacés qu’on trouve échoués sur les plages ont compris la raison qui les faisait se jeter sur le sable.

A quoi, selon vous, ressemblera le lecteur de demain ? Quelle sera sa façon de lire ?
...  Les exemples abondent : de la fin du CD-ROM à la connexion ADSL, de l’irruption de Google ou à la façon dont les réseaux sociaux l’évincent désormais partiellement, ou ce qui s’amorce avec l’arrivée des tablettes...On avance dans une mutation rapide, avec des effets évidemment chaotiques. Mais toute la réflexion, aussi bien côté sciences, que même dans notre petit domaine de littérature, avec les utopies négatives, ou ce qu’on trouve de géant à lire et relire Rabelais, qui inventait dans l’intérieur d’une mutation de même ampleur, c’est qu’on n’a pas forcément besoin de s’appuyer sur une prédictibilité pour négocier avec responsabilité – et invention – du présent.
... l’écrit n’a jamais concerné qu’un petit tiers des langues répertoriées. La lecture silencieuse est un concept qui a moins de 400 ans. La littérature a son origine dans cette tension d’avec le monde immédiat, qui produit aussi la transe, ou le chant, et où nommer participe sans doute du tout premier effroi. Cette tension, acceptons-la pour le présent : il y a tant à découvrir, inventer.
Raconter bien, disait Koltès : ça me suffit pour l’exercice du présent.

Ah ben ça va mieux en le disant (comment jl bourgeon) - merci, monsieur Bon...

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